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Vendredi 22 mai 2015 - 15:00

AVC : la SFNR formule des propositions pour déployer la thrombectomie en France

(Par Luu-Ly DO-QUANG)

PARIS, 22 mai 2015 (APM) - La Société française de neuroradiologie (SFNR) a formulé des propositions pour le déploiement en France de la thrombectomie pour la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux (AVC) en association avec les autres sociétés savantes et les partenaires institutionnels dans la perspective d'un prochain groupe de travail mis en place par le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, a-t-on appris auprès de neurologues impliqués dans ce dossier.

Dans un courrier adressé jeudi à la ministre, Marisol Touraine, la SFNR sollicite un entretien pour "évoquer les conditions de réalisation et l'accessibilité de la thrombectomie en France" après une succession de résultats, en février (cf APM FB8NJKERG) et en avril (cf APM FB1NMW8VJ), confirmant son efficacité, a indiqué son président, le Pr Alexandre Krainik du CHU de Grenoble, jeudi à l'APM.

La thrombectomie mécanique vise à rétablir la circulation sanguine dans le cerveau à l'aide d'un dispositif médical qui permet, par voie endovasculaire, de retirer un caillot sanguin chez des patients présentant une occlusion proximale des artères cérébrales. Elle émerge comme une technique de référence des AVC à la phase aiguë jusqu'à six heures, en complément de la thrombolyse intraveineuse (dans un délai de 4h30) ou d'emblée en cas de contre-indication de la thrombolyse.

"L'objectif {{...}} est de garantir un accès plus rapide et sécurisé à cette technique afin de réduire les conséquences des AVC et des handicaps associés {{...}}. Or, l'efficacité de la thrombectomie repose fortement sur les conditions de sa mise en oeuvre {{...}}, de la sélection des patients à la réalisation du geste en urgence, de la qualification des opérateurs aux matériels utilisés, de la multidisciplinarité de la filière de soins à sa valorisation économique", explique la société savante dans sa lettre dont l'APM a eu copie.

Elle a produit plusieurs documents qu'elle souhaite présenter au ministère comme "base de discussion": des recommandations françaises adaptées d'un consensus européen (cf APM LD1NK2BLL), une charte des conditions de réalisation de la thrombectomie, une carte interactive des centres de thrombectomie et des unités neurovasculaires (UNV) permettant de voir le maillage territorial en détails (distance, temps de transports, transfert international, etc.)... L'ensemble sera prochainement disponible sur le site internet des sociétés savantes concernées, précise le Pr Krainik.

La SFNR souligne dans son courrier "la nécessité de fixer les conditions précises des actes de thrombectomie, notamment sur le plan tarifaire, ainsi que l'organisation territoriale afférente".

Bien que déjà pratiquée en France, la thrombectomie, acte de neuroradiologie interventionnelle, n'est pas inscrite à la nomenclature. Après avoir demandé à plusieurs reprises, sans succès, à la Haute autorité de santé (HAS) d'inscrire l'examen de la création de cet acte à son programme de travail, la SFNR, la Société française de radiologie (SFR) et la Société française neurovasculaire (SFNV) ont redéposé un dossier en avril, conjointement cette fois, auprès de la HAS et de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam). "On espère être fixé d'ici un an", indique le Pr Krainik.

En dehors de l'acte, les conditions réglementaires sont réunies pour permettre le déploiement de la thrombectomie. La neuroradiologie interventionnelle est régie par différents décrets et arrêtés qui offrent déjà une médecine de qualité et ne demandent pas de grandes évolutions, ajoute-t-il. La thrombectomie doit notamment être réalisée par un neuroradiologue interventionnel entraîné et expérimenté, dans l'un des 38 centres de neuroradiologie autorisés dans le cadre d'un schéma interrégional d'organisation sanitaire (Sios) en cours, qui sont en lien avec les 132 UNV labellisées (à juin 2014, cf APM FB6NFOYMN) pour administrer la thrombolyse.

Selon l'état des lieux réalisé par la SFNR, la France compte 104 neuroradiologues interventionnels titulaires et 21 en formation. "Pour optimiser la filière de soins, il faudrait au moins quatre titulaires par centre, contre un peu moins de trois actuellement, et un autre en formation afin de répondre à l'extrême urgence car, en dehors de la thrombectomie, ces spécialistes s'occupent essentiellement d'autres pathologies, comme les anévrysmes hémorragiques et les malformations artério-veineuses, qui peuvent attendre le lendemain pour être traités", explique le président de la SFNR.

L'activité annuelle est estimée entre 3.000 et 4.000 actes. "Il faudrait donc multiplier l'activité actuelle par deux ou trois d'ici deux ans et pour cela augmenter le personnel compétent sur site de 44 neuroradiologues interventionnels titulaires et 16 en formation, éventuellement en réorientant les médecins déjà présents dans les services".

RENFORCER L'EXISTANT POUR GARANTIR LA QUALITE DES SOINS

"La SFNR privilégie le renforcement des centres existants pour garantir la pratique de la thrombectomie, sa qualité et sa pérennité. L'ouverture de centres supplémentaires est à envisager au cas par cas, en particulier lorsque les délais de transfert sont supérieurs à 90 minutes, sans transfert interrégional ou international possible", explique-t-elle dans sa charte.

Le document rappelle le cahier des charges des centres de thrombectomie, décrit le circuit du patient candidat et propose les pistes d'optimisation de l'activité neuroradiologique, comme la nécessité pour chaque centre de disposer d'un plateau d'imagerie (IRM, scanner et angiographie) accessible 24 heures sur 24 sans délai, d'avoir des protocoles pour les différents circuits d'admission du patient afin d'optimiser les moyens et délais d'acheminement, de réaliser des actes de télé-expertise voire de télédiagnostic, ce qui demande une "téléradiologie contractualisée et valorisée".

La mise en place d'un registre national exhaustif ainsi que d'indicateurs permettra d'évaluer l'activité et sa qualité pendant les deux prochaines années, ajoute la société savante. Se déclarant également soucieuse de la "maitrise des coûts", elle souligne l'importance d'une évaluation médico-économique.

Sur ce point, les premiers résultats de l'étude française THRACE sont attendus à la fin de l'année, indique à l'APM son coordonnateur, le Pr Serge Bracard du CHU de Nancy. Les résultats préliminaires de cet essai mené auprès de 412 patients montrent que la thrombectomie après une thrombolyse permet d'obtenir 55% de patients autonomes à trois mois de suivi (score de Rankin 0-2), contre 42% avec la thrombolyse seule, "ce qui suggère une économie car les coûts liés au handicap sont importants", poursuit-il, "convaincu" que cette stratégie est coût-efficace. Un suivi à un an des dépenses et de la qualité de vie est également prévu.

Concernant les dépenses, le Pr Bracard rappelle que cette étude, portant sur la plus grosse cohorte de patients traités par thrombectomie au niveau mondial, a été financée dans le cadre d'un programme de soutien aux technologies innovantes coûteuses (Stic) de 2009 à hauteur de 1,85 million d'euros principalement pour l'achat des équipements et du matériel. "En dehors de l'étude, des établissements ont choisi d'investir mais les frais ont été couverts notamment par le forfait GHS (groupement homogène de séjour) pour AVC grave."

La SFNR, la SFR, la SFNV ainsi que les sociétés de médecine d'urgence (SFMU), d'anesthésie-réanimation (Sfar), de neurochirurgie (SFNC et SFNLF) et de neurologie (SFN) travaillent conjointement sur le sujet. Une première réunion a déjà eu lieu au ministère fin avril avec la SFNV et la SFN. Un groupe de travail va être mis en place "à l'été ou à la rentrée" avec notamment les directions générales de la santé (DGS) et de l'offre de soins (DGOS), les sociétés savantes et des directeurs des hôpitaux, indique le président de la SFN, le Pr Didier Leys du CHU de Lille. Aucun calendrier prévisionnel n'a été annoncé.

Les textes réglementaires ne posent "pas de problème à court terme car aujourd'hui les centres de neuroradiologie sont principalement dans des CHU qui disposent à la fois d'UNV et de centre de neurochirurgie", commente le neurologue. Les décrets de 2007 imposaient la présence, sur place, d'un centre de neurochirurgie car la neuroradiologie interventionnelle concernait surtout les malformations artérielles ou artérioveineuses, explique-t-il. "Mais si la thrombectomie se généralise, dans un avenir lointain, les textes ne seront plus adaptés car la plupart des UNV sont dans des centres sans neurochirurgie. Dans ce cas il faut soit changer un décret, ce qui n'est pas simple, soit faire des exceptions, ce qui semble possible."

ld/eh/APM polsan
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LD0NOP064 22/05/2015 15:00 ACTU SNC

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